Un amour fidèle, de Paul Collin.

À la femme que j'attends.

Recueil : Les poèmes musicaux (1886)
L'amour que l'on se jure à l'autel du Seigneur,
Le seul de tous les biens qui vaille qu'on l'envie,
N'est pas un vain désir, un caprice du cœur,
C'est un amour qui doit durer toute la vie !

Ce n'est pas un rayon d'aurore et de printemps ;
C'est un amour fidèle : il se pourra, sans doute,
Qu'il n'ait pas jusqu'au bout sa fraîcheur de vingt ans,
Mais, s'il change, il ne doit jamais mourir en route.

C'est un amour fidèle : et sa fidélité
Doit, sans que rien au monde un seul instant l'émeuve,
S'avancer dans la paix et la sérénité.
Fort et vaillant, il doit résister à l'épreuve ;

Que dis-je, résister ? Résister, c'est trop peu !
Il faut qu'en traversant l'épreuve, il s'en augmente ;
Semblable à l'incendie immense dont le feu
S’active d'autant plus que le vent le tourmente !

C'est un amour fidèle : et quand on a la foi,
Quand on a, comme nous, l'éternelle espérance,
On sait que du trépas même il brave la loi :
Car la mort l'interrompt, mais pour qu'il recommence !

Sans plus rien redouter alors de l'avenir,
Sans plus se soucier du passé, qu’on oublie,
Sous le regard de Dieu, toujours prêt à bénir,
Le lien un moment dénoué se relie ! ...

« Jeune fille, à présent tu sais ce que j'entends
Par ce mot dont on a trop abusé : « Je t'aime ! »
Tu sais ce que promet à celle que j'attends
Ma bouche, et mieux encor, mon âme. Si, toi-même,

Tu crois que ce soit là le seul de tous les biens
Qui vaille qu’un cœur noble et généreux l'envie,
Viens alors nous pouvons marcher ensemble – Viens,
Viens, et que notre amour dure toute la vie ! ...

Paul Collin (1843-1915)