Le silence, de Charles de Pomairols.

Le silence.

Recueil : Les rêves et sentiments (1880)
Mon amour, j'aime à causer avec toi ; mais à moins
Que ce soit pour mieux lire au fond de ta belle âme
Ou pour rappeler l'heure où tu connus ma flamme,
Les propos entre nous me semblent de vains soins.

Par d'inutiles mots les cœurs ne sont pas joints ;
Tous les autres pensers, échappés à ta bouche,
Qui ne sont pas ceux-là dont le secret nous touche,
Viendraient nous séparer, incommodes témoins.

Au rythme de ton pas qui flotte et se balance,
J'aime mieux près de toi, dans la nuit, en silence,
Sentir mon cœur ému vers le tien se penchant.

Loin des hommes laissés à leurs discours frivoles,
De notre accord muet il se dégage un chant
Plus doux à murmurer que toutes les paroles.


Charles de Pomairols (1843-1916)