La pauvre colombe, d'Eugène Goubert.
La pauvre colombe.
Recueil : Les poésies et sonnets intimes (1872)
Pauvre colombe au blanc plumage, Où vas-tu ? Pourquoi donc quitter
Le nid charmant où ton jeune âge
Trouvait si doux de s'abriter ?
Là, pour toi petits soins, caresses,
Grains choisis et mille douceurs,
Ici, ni baisers, ni tendresses,
Et quels périls, quelles douleurs !
Ne vois-tu pas près de la branche
Où tu te balances sans peur,
L'ennemi qui vers toi se penche ?
Fuis, il est méchant et trompeur !
M'entends-tu ? — Vois, vois, imprudente,
Il s'approche en te regardant
L'œil en feu, la gueule béante,
Ah ! crains de tomber sous sa dent !
Prends ton vol, il est temps encore.
Que n'ai-je pu fermer les yeux ?
Hélas ! le cruel la dévore :
De ses pareils ce sont les jeux !
Ainsi la candide innocence,
Au piège tendu sous ses pas,
Court sans la moindre méfiance
Et se prend aux traîtres appâts !
Eugène Goubert